Possibilité de pirater le robot de cuisine Thermomix TM5. Parmi les possibilités : afficher des messages personnalisés ou modifier la température, sans aucune modification physique de l’appareil.
L’équipe de chercheurs en cybersécurité de Synacktiv a récemment mené une expérimentation saisissante sur le Thermomix TM5, robot de cuisine multifonctions de la société allemande Vorwerk, largement répandu dans les foyers français. Cette démonstration de piratage, effectuée dans un cadre strictement contrôlé, vise à attirer l’attention sur la réalité des risques auxquels s’exposent les objets connectés du quotidien, souvent perçus comme inoffensifs.
Le choix du Thermomix TM5 n’est pas anodin, mais il ne vise pas pour autant à stigmatiser ce produit ou à remettre en cause la sécurité du fabricant. Le robot culinaire dispose d’un niveau de sécurité supérieur à nombre de ses concurrents. Néanmoins, le Thermomix incarne parfaitement cette génération d’objets intégrant des composants informatiques et communicants, désormais omniprésents dans l’environnement domestique. La société Vorwerk a d’ailleurs réagi avec sérieux et rapidité à la découverte, autorisant la publication des résultats et engageant un dialogue avec les experts, une attitude saluée par l’ensemble du secteur.
« Les objets connectés deviennent des ordinateurs comme les autres, donc des cibles potentielles d’attaquants. »
L’expérimentation a été menée sans qu’aucune modification physique ne soit apportée au robot de cuisine. À partir d’une analyse approfondie de son système embarqué, les experts en cybersécurité ont identifié des vulnérabilités permettant de prendre le contrôle de certaines fonctionnalités de l’appareil. Il a ainsi été possible d’afficher des messages personnalisés sur l’écran tactile, de manipuler la température de chauffe, ou encore de provoquer l’apparition de messages d’erreur non prévus. Cette prise de contrôle, bien qu’encadrée et réalisée par des chercheurs dans le cadre d’un test, illustre la capacité d’un attaquant à détourner un objet familier pour en faire un outil à des fins malveillantes, si les failles sont exploitées dans des conditions réelles.
La démonstration rendue publique
Synacktiv a choisi de rendre publique cette démonstration pour illustrer l’enjeu que représentent les objets connectés dans l’évolution du risque cyber. Aujourd’hui, ces équipements, qu’il s’agisse de robots de cuisine, d’enceintes intelligentes, de montres connectées, de caméras de surveillance ou encore de systèmes de chauffage, sont présents par milliards à travers le monde. Le risque, jusqu’ici principalement associé aux ordinateurs et téléphones, concerne désormais l’ensemble de l’électroménager connecté et plus largement tous les objets intelligents du quotidien.
« Plus un appareil est connecté, plus il peut devenir une porte d’entrée s’il est mal protégé. »
La démonstration, bien qu’étonnante, ne visait pas à créer l’inquiétude chez les utilisateurs. Les conditions de l’attaque restent complexes, nécessitant des compétences avancées et un accès physique ou logique particulier à l’appareil. Cette opération relève d’une démarche de recherche responsable, qui ne menace pas directement les possesseurs de Thermomix TM5. Toutefois, le message transmis est clair : la sécurité des objets connectés doit être prise en compte avec le même sérieux que celle des ordinateurs ou des smartphones.
Des dispositifs de sécurité dès la conception des produits
L’opération a d’autant plus d’impact que Vorwerk, informé en amont, a collaboré et fait preuve d’une transparence saluée par la communauté. Le fabricant a pris acte des vulnérabilités révélées et s’est engagé à travailler à l’amélioration de la sécurité de ses produits. Cette réactivité est encore trop rare dans le secteur, où la communication autour des failles de sécurité demeure souvent limitée, par crainte de porter atteinte à l’image de marque ou de subir des conséquences juridiques. En autorisant la publication des résultats, Vorwerk envoie un signal fort à l’industrie et démontre une maturité croissante face aux enjeux de la cybersécurité.
« Dialoguer avec les experts pour comprendre et corriger les failles démontre une maturité sur ces enjeux, c’est un signal fort pour le marché. »
Au-delà du cas du Thermomix TM5, cette expérience met en évidence la nécessité pour les fabricants d’intégrer des dispositifs de sécurité dès la conception des produits. Il est essentiel que la sécurité ne soit pas reléguée au second plan, mais qu’elle devienne un critère central, au même titre que la performance ou le design. Les appareils connectés, de par leur architecture, peuvent constituer des points d’entrée vers les réseaux domestiques ou professionnels, exposant l’ensemble des systèmes à des risques démultipliés. L’enjeu n’est plus seulement la protection des données personnelles, mais aussi la prévention de scénarios de sabotage ou de détournement de fonctions critiques.
La sensibilisation du public à cette problématique demeure aujourd’hui limitée. Les consommateurs ne sont pas toujours informés des risques liés à l’usage des objets connectés.