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Le casse des capteurs militaires au cœur de la Silicon Valley

Un ingénieur modèle, deux passeports, et un sacré culot. À la clef : un braquage discret mais colossal de secrets militaires américains, orchestré depuis un banal bureau californien.

Un ingénieur à double nationalité, passé par Stanford et la Silicon Valley, a orchestré le vol de plus de 3 600 fichiers confidentiels sur des capteurs et caméras militaires de pointe, destinés à protéger les avions contre les missiles et à surveiller l’espace. Recruté par des programmes chinois visant à rapatrier l’innovation, il a exploité les failles internes de son employeur américain avant d’être démasqué par une enquête numérique. Retour sur un crime aux répercussions internationales, révélateur des enjeux de la guerre technologique et du pillage de la propriété intellectuelle, où un seul individu a mis en péril la sécurité nationale.

Un voleur aux deux passeports : le profil d’un ingénieur discret

Chengguan Gong, 59 ans, incarne la réussite de l’immigration dans la Silicon Valley. Entré aux États-Unis en 1993, formé à Clemson puis à Stanford, il devient citoyen américain en 2011 – tout en conservant sa nationalité chinoise. C’est un spécialiste reconnu des capteurs CMOS et des technologies sensibles, courtisé par des entreprises du secteur militaire.

Derrière cette success story, une ambition plus trouble émerge : dès 2014, Gong commence à postuler aux « programmes de rapatriement de talents » chinois, ces concours subventionnés à coup de centaines de milliers de dollars, destinés à drainer vers Pékin compétences… et secrets industriels.

Entre fin mars et avril 2023, Gong opère à la vitesse de l’éclair. Il copie méthodiquement plus de 3 600 fichiers – plans, schémas, documentation technique – de son poste de travail vers un simple clé USB et deux disques durs. Le timing n’a rien d’anodin : le 5 avril, il signe chez un concurrent direct dans le domaine des capteurs infrarouges. Il intensifie alors les copies, double les sauvegardes sur son ordinateur personnel, et prépare sa fuite numérique.

Son butin ? Des technologies critiques : capteurs capables de protéger des avions contre les missiles à guidage thermique, caméras résistant aux radiations pour l’observation spatiale, et circuits intégrés conçus pour repérer les lancements de missiles et d’objets hypersoniques. Le tout estimé à plusieurs centaines de millions de dollars par la société lésée.

L’affaire Gong révèle un angle mort inquiétant : la porosité entre recherche militaire américaine et programmes étatiques chinois. Entre 2014 et 2022, Gong multiplie les candidatures aux “talent programs” chinois, propose les mêmes technologies que celles développées dans ses fonctions américaines, et finit même demi-finaliste d’un concours… en présentant des photos du matériel de son entreprise.

Ce système de chasse aux cerveaux, installé dès les années 1990 en Chine, offre primes et financements massifs aux ingénieurs expatriés prêts à ramener “leur” expertise. Pour Gong, la récompense : près de 2 800 dollars pour une simple participation, et la promesse de sommes bien plus importantes à la clef.

Les failles internes et la riposte numérique

Gong pensait son stratagème à l’abri derrière la routine du télétravail et un départ “pour raisons familiales”. Mais les équipes IT de son employeur veillent au grain. En mars, un audit interne met au jour des mouvements de fichiers anormaux. L’alerte est donnée, le FBI entre en scène, commence sa surveillance, saisit les supports physiques et découvre l’ampleur de la fuite.

Les preuves sont accablantes. Gong reconnaît les faits, expliquant avoir commencé à copier des documents dès son arrivée aux États-Unis – preuve d’un projet de longue haleine plus qu’un simple “coup d’opportunité”. Accusé d’avoir mis en péril la sécurité nationale, il encourt jusqu’à dix ans de prison.

Analyse : le crime d’un homme seul ou le symptôme d’une guerre invisible ?

Au-delà de l’affaire, c’est tout l’écosystème de la recherche technologique qui tremble. Une simple négligence interne, un employé sous le radar, et la propriété intellectuelle la plus sensible se retrouve potentiellement à disposition d’États concurrents. L’affaire Gong rappelle que la guerre de l’innovation ne se joue plus seulement dans les laboratoires, mais aussi dans les back-offices des entreprises les plus prestigieuses.

La conclusion s’impose : à l’heure de la guerre économique mondiale, la vigilance doit être maximale, la cybersécurité renforcée, et la protection du “capital humain” aussi stratégique que celle des data centers.

Classification des données : la première étape pour sécuriser votre propriété intellectuelle

Le piratage médiatisé du site Ashley Madison devrait inciter toute entreprise hébergeant des données (à vrai dire, toutes les entreprises de la planète) à se pencher sérieusement sur la sécurité de leurs données. Dès lors que vous saisissez des informations d’une personne dans la base de données de votre entreprise, vous devez vous assurez que ces dernières restent privées et confidentielles. Cette exigence fait partie des bonnes pratiques, et, dans certains pays, elle est même réglementaire.  En cas de piratage et de divulgation de ces données, vous pourriez bien encourir des poursuites judiciaires et des pénalités… sans compter la mauvaise presse qui ternira l’image de votre entreprise.

Les entreprises soumises aux réglementations les plus strictes, dans les métiers de la finance et des soins de santé par exemple, connaissent plutôt bien les informations dont elles disposent, ainsi que leur niveau de confidentialité. Mais de nombreuses autres entreprises ne sont pas forcément au fait de leurs obligations en matière de sécurité de leurs bases de données. A titre d’exemple, un point de vente est susceptible de détenir des informations personnelles liées à un programme de fidélité, tandis qu’un acteur de la vente par correspondance gère des centaines ou des milliers de numéros de carte de paiement. Autant de données qui exigent d’être parfaitement sécurisées.

Et il ne s’agit pas que des informations personnelles : toute ressource ou donnée confidentielle ou propriétaire (propositions commerciales, rapport de gestion de la relation clients, plans stratégiques, et autres), bien que ne relevant pas forcément de la réglementation en matière de confidentialité des données, doit néanmoins rester à l’abri des regards indiscrets.  Et pour compliquer les choses, dès que vous stockez les données dans le Cloud ou dans des centres de données tiers, vous perdez quelque peu le contrôle sur la gestion de ces données. Pas simple et clair de connaître précisément vos obligations et responsabilités.

Les métadonnées, essentielles à la protection des données
L’une des étapes clé lorsque vous sécurisez vos bases de données est de classifier ces données. Toutes les données ne représentent pas la même valeur pour votre entreprise. Certaines, d’ordre financière, ou portant sur des informations clients ou personnelles, exigent une protection optimale. D’autres éléments, à l’image de documents internes généralistes ou de brochures marketing ne sont pas aussi sensibles. Il est donc pertinent de ne pas traiter toutes vos données de la même façon. La hiérarchisation des données peut également impacter le stockage. Certaines données peuvent être stockées en mémoire pour un accès rapide, tandis que d’autres trouveront leur place sur des bandes magnétiques.

Le concept essentiel qui sous-tend cette approche est celui de la métadonnée. C’est une information à propos d’une information. Une métadonnée descriptive, lorsque formulée de manière appropriée, présente un réel atout pour votre stratégie de sécurité de données. Les métadonnées peuvent contenir des champs dédiés au niveau de la confidentialité (public ou privé, secret, très sensible, etc.), la date de recueil des données, le détail des traitements réalisés sur les données, les niveaux d’accès (rôles et profils pouvant accéder à cette donnée) et, très important, le délai à partir duquel ces données peuvent être supprimées.

Arbitrer le coût de la sécurité/du stockage des données et leur valeur
Les audits de données gagnent en importance et témoignent de la lutte menée par les organisations pour sécuriser et stocker des bases de données toujours plus volumineuses. Avec la business intelligence, les référentiels de données et le Big Data, les organisations se contentent de recueillir les données une fois, pour ensuite les propager sur l’ensemble de leur parc systèmes. Le stockage et la sécurité des données sont onéreux et les meilleures pratiques incitent à évaluer vos investissements de sécurité et de stockage compte tenu de la valeur de chaque profil de données pour votre organisation. Les métadonnées forment ainsi un levier qui permet d’effectuer des audits de données efficaces et exhaustifs.

Le chiffrement pour protéger sa propriété intellectuelle

Dans une étude publiée fin 2014, le spécialiste de la sécurité Kasperky Lab, soulignait que près de 20 % des entreprises industrielles ont subi un vol de propriété intellectuelle. S’il existe un cadre juridique et des solutions qui permettent de protéger sa propriété intellectuelle sur un marché local et à l’international, l’espionnage industriel n’en reste pas moins une réalité.

Ces mesures juridiques sont le plus souvent complétées par des solutions de protection physique (vidéosurveillance, alarmes, etc.) et informatique. Pourtant, l’évolution permanente des technologies, des terminaux et des applications complexifie la mise en œuvre d’une sécurité efficace.

Que ce soit le fait d’un employé peu scrupuleux qui profite d’un mauvais paramétrage ou de permissions d’accès trop étendues aux données sensibles ou d’une attaque extérieure qui exploitera une faille, une mise à jour oubliée ou une attaque ciblée, comment garantir que vos données sont à l’abri ? Comment faire en sorte que même piratés, les plans ou la formule de votre prochain produit stratégique ne puissent être exploités ?

Car une entreprise peut protéger le périmètre de son système d’information autant qu’elle veut, elle sera forcément victime d’une attaque dans un avenir plus ou moins proche. Or que ce passera-t-il si les protections ne fonctionnent pas ? Comment garantir la confidentialité des données relatives à la propriété intellectuelle même en cas de vol ?

Le contrôle des permissions et des accès : une bonne gouvernance est essentielle

Au delà des protections classiques que l’on retrouve au sein des entreprises (pare-feu, antivirus, proxy, etc.), l’une des premières choses à faire lorsque l’on souhaite garder le contrôle des données sensibles, c’est de mettre en place une bonne gouvernance des données. Cela consiste à définir qui a le droit d’accéder à quelles données et de pouvoir contrôler l’historique des accès, des modifications et les changements d’emplacement de ces dernières.

Le contrôle des permissions d’accès et surtout le suivi de ces accès permet d’avoir un premier niveau d’alerte en cas de mouvements suspects, que ceux-ci soient le fait d’un employé indélicat ou d’un pirate ayant réussit à pénétrer le système. Nous avons chaque jour des preuves que cela est possible.

L’autre solution consiste à protéger les données elles-mêmes afin de les rendre inexploitables en l’état en cas de piratage.

Protéger la données elle-même : le chiffrement

Le chiffrement reste une valeur sûre pour protéger des données de manière efficace. Comme le définit Wikipedia « Le chiffrement est un procédé de cryptographie grâce auquel on souhaite rendre la compréhension d’un document impossible à toute personne qui n’a pas la clé de (dé)chiffrement. ». Le chiffrement présente donc un réel intérêt pour les entreprises qui souhaitent protéger des données telles que celles liées à leur propriété intellectuelle pour les rendre illisibles, même (et surtout) en cas de vol. Il faudrait en effet déployer des efforts considérables et utiliser un matériel sophistiqué tel qu’un supercalculateur, pour avoir une chance de déchiffrer des données chiffrées obtenues de manière frauduleuse.

Une fois chiffrées, les données ne peuvent être lues que par les personnes ayant la clé pour pouvoir le faire et ce, où qu’elles sont stockées. Qu’elles soient sur le réseau de l’entreprise, dans le cloud, sur une clé USB ou qu’elles soient échangées par email ou tout autre moyen. Les données chiffrées resteront constamment protégées. L’entreprise sera ainsi la seule à pouvoir accéder au contenu des fichiers, garantissant ainsi leur totale sécurité.

Il convient toutefois de choisir sa solution de chiffrement avec soin. Mieux vaut éviter les solutions de chiffrement non validées ou gratuites dont la fiabilité n’est pas complètement garantie. Idéalement, une entreprise devra porter son choix vers une solution certifiée par des organismes reconnus tel que l’ANSSI (Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information).

Ensuite, il faut que cette solution garantisse à l’entreprise, et uniquement à l’entreprise, la totale responsabilité en ce qui concerne la gestion des clés. Le chiffrement doit se faire sur votre système avec la clé conservée en interne.

Si vous décidez d’opter pour le chiffrement et que vous restez maître de vos clés, alors la sécurité de votre propriété intellectuelle sera pleinement garantie.

Dans une récente étude, l’institut Ponemon révélait que « 33 % des entreprises françaises disposent d’une stratégie de chiffrement ». On peut s’étonner que le nombre d’utilisateurs soit si faible alors que la protection des données n’a jamais été aussi importante. Mais soyons positif cela laisse une bonne marge de progression. (‎Par Xavier Dreux, Responsable Marketing chez Prim’X)

Près de 20% des entreprises industrielles ont subi un vol de propriété intellectuelle

L’étude de Kaspersky Lab auprès de 3900 entreprises classe les répondants dans 17 secteurs différents, y compris la fabrication et l’énergie. Ces deux secteurs industriels se démarquent par l’architecture de leur réseau informatique, composé de machines gérées par des logiciels hautement spécifiques.

Propriété intellectuelle : 21% des organisations opérant dans le secteur de la production / fabrication ont dû faire face à une perte de leur propriété intellectuelle au cours des 12 derniers mois (le 5ème taux le plus important). Cela pourrait expliquer pourquoi elles donnent plus d’importance à la propriété intellectuelle (17%) que tous les autres secteurs.

Veille marché / Intelligence : les données de veille marché sont perçues comme étant de moyenne importance pour les entreprises de production, alors que les spécialistes de l’énergie les considèrent comme critiques. Les deux secteurs sont particulièrement touchés par le vol de ce type de données.

Informations clients : ces informations ne sont pas jugées comme critiques et ne sont pas la cible privilégiée des cyber criminels. Pourtant il faut prendre ces données très sérieusement, comme peut le montrer, très souvent, le protocole d’alerte de zataz.com.

Informations opérationnelles : les entreprises de production et énergétiques sont toutes particulièrement concernées par la perte de données internes liées à leur fonctionnement. Près de la moitié d’entre elles ont admis avoir perdu ce type d’informations après une fuite de données au cours des 12 derniers mois.

Les spécificités de la sécurité en secteur industriel
L’étude de Kaspersky Lab illustre les différences fondamentales qui existent entre les entreprises industrielles et les autres en matière d’informatique. Les entreprises traditionnelles se concentrent sur la protection des données, alors que les entreprises industrielles jugent critique la protection des process. Les données montrent l’importance accordée aux données liées au fonctionnement interne par rapport aux données clients, souvent considérées comme les plus sensibles dans d’autres secteurs.

À l’inverse, les données de moindre importance pour les entreprises classiques, comme la propriété intellectuelle, sont critiques dans le secteur industriel. 31% des entreprises de production sont convaincues que la propriété intellectuelle est directement visée lors d’attaques cyber criminelles. Tous secteurs confondus, c’est le taux le plus important après celui enregistré pour le secteur financier.

Il est clair que les réseaux informatiques industriels exigent une protection spécifique, en particulier face à des malware sophistiqués comme Wiper et Shamoon qui ont causé des millions d’euros de dommages en s’attaquant à des systèmes industriels. Kaspersky Lab a développé des solution de protection des infrastructures critiques, pensées pour répondre aux exigences de l’univers industriel en matière de contrôle et de sécurité.