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Vulnérabilité dans les applications Xiaomi

Les smartphones sont généralement fournis avec des applications préinstallées, dont certaines sont utiles et d’autres ne sont jamais utilisées. Un utilisateur ne s’attend toutefois pas à ce qu’une application préinstallée soit réellement dommageable pour sa vie privée et sa sécurité.

Check Point Research a récemment découvert une vulnérabilité dans l’une des applications préinstallées de Xiaomi, l’un des plus importants fabricants de téléphones mobiles au monde, qui avec près de 8 % de parts de marché en 2018, se classe troisième sur le marché de la téléphonie mobile. Ironiquement, l’application de sécurité préinstallée « Guard Provider », qui est censée protéger les téléphones contre les logiciels malveillants, expose les utilisateurs à des attaques.

En raison de la nature non sécurisée du trafic réseau entre Guard Provider et les différents SDK utilisés par l’application, un pirate pourrait se connecter au même réseau wifi que la victime et déclencher une attaque de type Man-in-the-Middle. Des failles dans les communications entre les différents SDK permettraient au pirate d’injecter n’importe quel logiciel malveillant de son choix, par exemple pour dérober des mots de passe ou surveiller les activités de l’utilisateur, un logiciel rançonneur ou tout autre type de logiciel malveillant. Pour plus de détails techniques, veuillez consulter Check Point Research.

Comme toutes les applications préinstallées telles que Guard Provider, ce type d’application est présent sur tous les appareils mobiles et ne peut être supprimé. Conformément à sa politique de communication responsable, Check Point a notifié Xiaomi, qui a publié un correctif peu de temps après.

Les avantages et les inconvénients des SDK

 Un kit de développement logiciel (SDK) est un ensemble d’outils de programmation permettant aux développeurs de créer des applications pour une plate-forme spécifique. Dans le cas des appareils mobiles, les SDK mobiles permettent aux développeurs de gagner du temps en leur évitant d’avoir « à réinventer la roue » et d’améliorer la stabilité du back-end pour les fonctionnalités qui ne sont pas liées au cœur de leur application.

À mesure que le développement de SDK s’accroit, de nouvelles opportunités d’apporter de meilleures fonctionnalités à leurs utilisateurs se présentent aux développeurs d’applications.

Mais lorsque de plus en plus de codes tiers s’ajoutent à une application, les efforts pour maintenir la stabilité de son environnement de production, protéger les données des utilisateurs et contrôler les performances, deviennent beaucoup plus complexes.

SDK fatigue

On emploie le terme « d’usure par SDK » (de l’anglais « SDK fatigue ») pour décrire cette utilisation accrue de plusieurs SDK au sein de la même application, qui rend l’application plus vulnérable à des problèmes de plantage, de virus, de logiciels malveillants, de failles de confidentialité, de consommation d’énergie, de ralentissement et bien d’autres problèmes.

Les inconvénients cachés de l’utilisation de plusieurs SDK au sein d’une même application résident dans le fait qu’ils partagent tous le contexte et les autorisations de l’application. Ces principaux inconvénients sont :

  1. Un problème dans un SDK compromettant la protection de tous les autres.
  2. Les données de stockage privées d’un SDK ne peuvent pas être isolées et sont donc accessibles à un autre SDK.

Selon un rapport récent, l’utilisation de plusieurs SDK dans une seule application est beaucoup plus courante qu’on ne le pense. Plus de 18 SDK sont implémentés en moyenne dans la même application. Ce faisant, les développeurs exposent les entreprises et les utilisateurs à des dangers potentiels qui peuvent être exploités par les pirates pour perturber le fonctionnement normal des appareils.

2 + 2 n’est pas toujours = à 4

Le personnel de sécurité informatique d’une entreprise n’est pas censé connaître les tenants et les aboutissants des kits de développement logiciel (SDK) utilisés pour créer les applications que les employés installent éventuellement sur leurs appareils. Il est cependant important de savoir que la façon dont les applications sont développées peut comporter des risques pour la sécurité. On pourrait supposer que les éléments utilisés dans une application de sécurité sont sécurisés, mais comme le montre la vulnérabilité dans les applications préinstallées de Xiaomi, c’est loin d’être le cas.

Les développeurs et les entreprises doivent également comprendre qu’un élément sécurisé associé à un autre élément sécurisé dans une application sur un téléphone ne signifie pas nécessairement que l’ensemble restera sécurisé lorsque ces deux éléments seront mis en œuvre conjointement.

La seule défense contre ces menaces cachées et obscures consiste à garantir que le parc d’appareils mobiles de votre entreprise est protégé contre les attaques de type Man-in-the-Middle.

Les failles de données ont compromis 4,5 milliards de dossiers au 1er semestre 2018

945 failles ont compromis 4,5 milliards de dossiers dans le monde au cours du premier semestre 2018.

La société Gemalto, spécialiste des solutions de sécurité informatique, vient de sortir son nouveau rapport, le Breach Level Index. Un rapport tiré d’une base de données mondiale sur les failles de données publiques. Le rapport révèle que 945 failles ont compromis 4,5 milliards de dossiers dans le monde au cours du premier semestre 2018. Comparé à la même période en 2017, le nombre de dossiers perdus, volés ou exposés a connu une augmentation vertigineuse de 133%, malgré une légère baisse du nombre total de failles sur la même période, ce qui indique une élévation de la gravité de chaque incident. Un total de six failles sur les réseaux sociaux, y compris l’incident Cambridge Analytica-Facebook, a représenté plus de 56% du total de dossiers exposés. Sur les 945 failles de données, 189 (20%) ont compromis un nombre inconnu de dossiers.

D’après le Breach Level Index, près de 15 milliards de dossiers ont été exposés depuis 2013, lorsque l’indice commença à répertorier les failles de données rendues publiques. Durant les six premiers mois de 2018, plus de 25 millions de dossiers ont été compromis ou exposés chaque jour, soit 291 dossiers à la seconde, y compris des données médicales, de cartes de crédit et/ou financières, ou des données personnelles. Ce phénomène est particulièrement inquiétant étant donné que seulement 1% des données volées, perdues ou compromises étaient protégées par cryptage pour rendre les informations inutilisables, soit 1,5% de moins que pendant les six premiers mois de 2017.

Principales sources de failles de données

Les activités malveillantes externes sont la première cause de failles de données (56%), soit une légère baisse de près de 7% par rapport au second semestre 2017 et représentent plus de 80% de toutes les données volées, exposées ou perdues. Le nombre de pertes accidentelles dépasse les 879 millions (9%) de dossiers perdus pendant ce semestre, la deuxième cause de failles de données, soit plus du tiers des incidents. Ce semestre, le nombre de dossiers et d’incidents impliqués dans des activités malveillantes internes a diminué de 50% en comparaison avec la même période en 2017.

Principaux types de failles de données

Le vol d’identité continue d’être le principal type de faille de données, ce qui est le cas depuis que Gemalto a commencé le suivi de ces activités en 2013. Alors que le nombre de violations par vol d’identité a augmenté de 13% par rapport au second semestre 2017 pour légèrement dépasser les 64%, le nombre de dossiers volés par ces incidents a augmenté de 539%, et représente plus de 87% de tous les dossiers volés. Les incidents d’accès aux données financières suivent une tendance inquiétante d’intensification de la gravité. Bien que le nombre total d’incidents soit en baisse entre le S1 2017 et le S1 2018 (171 pour le S1 2017 et 123 pour le S1 2018), le nombre de dossiers piratés a augmenté entre le S1 2017 et le S1 2018 (2,7 millions et 359 millions, respectivement).

Secteurs les plus touchés par les failles de données

La plupart des secteurs ont connu une augmentation des incidents en comparaison avec le semestre précédent, à l’exception des organes gouvernementaux, des services professionnels, du commerce de détail et des technologies, même si les organes gouvernementaux et le commerce de détail ont affiché une augmentation du nombre de dossiers exposés et une diminution du nombre d’incidents. La santé reste le premier secteur en termes de nombre d’incidents (27%).

La faille la plus importante, appelée 211 LA County, a exposé 3,5 millions de dossiers à la suite d’une fuite accidentelle. Les réseaux sociaux arrivent en tête du nombre de données compromises (56%) en raison des brèches de données d’utilisateurs très médiatisées chez Facebook et Twitter, avec 2,2 milliards et 336 millions de données exposées, respectivement.

Répartition géographique des failles de données

L’Amérique du Nord représente toujours la majeure partie de toutes les failles et du nombre de données exposées, avec 59 et 72% respectivement. Les États-Unis restent de loin la cible privilégiée des attaques, et représentent plus de 57% des failles au niveau mondial et 72% de toutes les données perdues, même si le total des incidents a diminué de 17% par rapport au semestre précédent. Avec l’adoption de la loi « Notifiable Data Breaches », le nombre d’incidents en Australie a considérablement augmenté (de 18 à 308), comme cela était à prévoir.

L’Europe a connu une diminution de 36% des incidents, mais une augmentation de 28% du nombre de données compromises, ce qui indique une élévation de la gravité des attaques. Le Royaume-Uni reste le pays le plus attaqué de la région. Avec l’entrée en vigueur du RGPD durant le second semestre 2018, le nombre d’incidents déclarés pourrait commencer à augmenter.

Des chiffres et du marketing qui ne révélent pas la triste réalité des fuites de données. Dataleak.exposed portail web qui permet de cybersurveiller les réseaux pirates et la vente/diffusion de fuites de données a référencé, en 2018, plus de 400 000 bases de données piratées !

Lutte contre le cyber-terrorisme : vie privée et sécurité nationale

Une étude révèle des attitudes et des avis différents dans la région EMEA quant à l’utilisation des données personnelles et la lutte contre le cyber-terrorisme.

Une étude initiée par F5 Networks et menée à l’échelle européenne auprès de 7 000 personnes (1) révèle que 75 % des individus n’ont aucune confiance dans les réseaux sociaux et les entreprises marketing, en ce qui concerne la protection de leurs données personnelles. 70 % des individus se disent « préoccupés » lorsqu’ils partagent leurs données avec des entreprises et 64 % inquiets pour leur vie privée. Seuls 21 % sont convaincus que les entreprises peuvent protéger efficacement leurs données contre le piratage.

Lutte contre le cyber-terrorisme : Une confiance sous conditions
Sur l’ensemble du panel, plus de la moitié des individus sont prêts à partager leurs données – date de naissance (53 %), statut matrimonial (51 %) et intérêts personnels (50 %) en échange de l’utilisation gracieuse de services. En France, ils sont 55 % à être prêts à communiquer leurs intérêts personnels (contre seulement 35 % au Royaume-Uni).

Pourtant, près d’un cinquième des répondants (18 %) déclare qu’ils ne partageraient jamais leurs données contre un service, ce qui est le cas de 21 % des français et de 33 % des britanniques. En fait, sur la région EMEA, les habitants du Royaume-Uni sont les moins disposés à communiquer leurs données.

Un degré de confiance différent selon le secteur d’activité de l’entreprise
Les individus considèrent les banques comme les sociétés les plus dignes de confiance (76 %) et leur font davantage confiance pour protéger leurs données (73 %) que les entreprises d’autres secteurs. Il reste toutefois une insatisfaction concernant les méthodes utilisées pour protéger les données. Les utilisateurs trouvent ainsi que les banques (77 %), les organismes de santé (71 %), de même que le secteur public et le gouvernement (74 %), ont besoin de renforcer leurs systèmes d’authentification pour atteindre un plus haut niveau de sécurité.

« Les acteurs traditionnels tels que les banques sont, par leur activité, considérés comme de confiance », commente Antoine Huchez, responsable marketing Europe du Sud chez F5 Networks à DataSecurityBreach.fr. « Pourtant, cela ne nous empêche pas les consommateurs de partager des informations sur les réseaux sociaux, alors qu’ils considèrent ceux-ci comme peu fiables, en matière de protection des données personnelles. Les utilisateurs étant de plus en plus sensibilisés sur les risques, les entreprises doivent mettre en place une infrastructure de sécurité et de protection des données – technologie, éducation et processus – suffisamment rigoureuse pour répondre aux inquiétudes de leurs utilisateurs et garder la confiance de leurs clients ».

Le débat lutte contre le cyber-terrorisme : confidentialité ou protection ?
Le règlement européen sur la protection des données personnelles (General Data Protection Regulation – GDPR), récemment approuvé par le Parlement européen, donne aux citoyens le droit de se plaindre et d’obtenir réparation si leurs données sont mal utilisées au sein de l’UE. Lorsqu’on leur demande ce qu’ils considèrent comme un mauvais usage de leurs données, plus des deux tiers (67 %) des individus mentionnent le partage de leurs données avec des tiers sans leur consentement. A noter que sur les pays Européens si ce partage de données sans consentement est une mauvaise pratique pour 75 % des consommateurs britanniques, les français sont seulement 59 % à le penser – les polonais (71%), les allemands (68 %) et les habitants du Benelux (62 %).

Dans le sillage du débat entre Apple et le FBI concernant le déverrouillage d’un smartphone, 43 % des individus sont d’accord avec l’affirmation selon laquelle les entreprises sur le marché des nouvelles technologies devraient accorder la priorité à la sécurité nationale plutôt que sur la vie privée et fournir aux organismes gouvernementaux l’accès aux périphériques verrouillés. Les chiffres sont encore plus élevés au Royaume-Uni (50 %), au Benelux (49 %) et en France (46%) mais plus faibles en Allemagne (38 %) et en Arabie Saoudite (37 %).

La sécurité nationale passe devant le droit à la vie privée avec une différence de 12 points, mais pour 43% des individus, la responsabilité de protéger les citoyens contre les menaces cyber-terroristes incombe à leur gouvernement et un cinquième (21 %) des personnes interrogées pensent que chacun devrait être responsable de sa protection. « Les individus prennent ainsi conscience qu’ils peuvent jouer un rôle dans la sécurité nationale mais les responsabilités ne sont pas encore clairement établies », conclut à DataSecurityBreach.fr Antoine Huchez, responsable marketing Europe du Sud chez F5 Networks.

(1)L’étude, menée par Opinium Research, a interrogé plus de 7 000 individus à travers le Royaume-Uni, l’Allemagne, la France, le Benelux, les Émirats Arabes Unis, l’Arabie Saoudite et la Pologne, afin de recueillir leur avis quant à la sécurité et l’utilisation des données personnelles.

Les écoles autorisées à vendre les données des enfants

Des écoles américaines autorisées par la loi fédérale à vendre des informations de leurs élèves aux commerçants.

Voilà qui ne présage rien de bon pour le futur de nos écoles. Aux USA, la loi fédérale autorise dorénavant les écoles publiques à remplir leur caisse en commercialisant les informations des élèves. Il faut dire aussi qu’à la vue des documents que les parents peuvent remplir à chaque rentrée, et durant l’année, les bases de données des établissements scolaires n’ont rien à envier à big brother.

Les sociétés de marketing louchent sur ces clients prescripteurs. En Europe, les sociétés investissent, sous forme de mécénat et autres rendez-vous scolaires (Junicode, cross de l’école, soirée étudiante, …) mais n’ont pas encore la main mise sur les données. Aux USA, les parents doivent trouver la petite case qui interdit la diffusion des données. Elle est souvent cachée dans le monceau de feuilles à signer. En France, comme ailleurs, n’hésitez pas à ouvrir une adresse mail dédiée uniquement à l’année scolaire en cours [sco2016@votrenomdedomaine.fr, par exemple] et lisez bien les petites lignes, comme celle qui vous informe que votre enfant pourra finir dans la presse locale/territoriale lors d’une sortie de classe, d’une fête d’école, … [WTOP]

L’Etat Français condamné par l’Europe pour atteinte à la vie privée

Le Système de traitement des infractions constatées (STIC) vient d’être montré du doigt par l’Europe. La France condamnée à 3000€ de réparation pour avoir conservé des données de manière disproportionnée.

Dans un arrêt du 18 septembre 2014, la justice européenne des droits de l’homme a jugé coupable la France d’avoir violé l’article 8 de la convention européenne des droits de l’homme qui indique que « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ».

Comme l’indique Legalis, la cour européenne a stipulé que « l’État défendeur a outrepassé sa marge d’appréciation en la matière, le régime de conservation des fiches dans le STIC, tel qu’il a été appliqué au requérant, ne traduisant pas un juste équilibre entre les intérêts publics et privés concurrents en jeu. Dès lors, la conservation litigieuse s’analyse en une atteinte disproportionnée au droit du requérant au respect de sa vie privée et ne peut passer pour nécessaire dans une société démocratique. ».

Tout avait débuté après une dispute de couple. L’homme avait été fiché dans le STIC et avait réclamé que soient effacées les données après la conclusion « positive » de cette affaire familiale. La justice française avait refusé. Bilan, l’Europe condamne la France à payer 3.000€ de réparation à l’homme contrarié.

Les données personnelles des Européens ne sont pas à vendre !

Ce mercredi à Strasbourg, le Parlement européen a enfin adopté le paquet sur les données personnelles. Après trois ans de travail parlementaire les eurodéputés ont adopté à une forte majorité le règlement (621+, 10-, 22 abst) et, malgré l’opposition de la droite européenne, la directive (371+, 276 –, 30 abst) sur les données personnelles et ont octroyé aux deux rapporteurs du Parlement européen,  Jan-Philippe Albrecht (Verts, All) et Dimitrios Droutsas (S&D, GR), un large mandat de négociation avec le Conseil et la Commission européenne.

« C’est un signal politique fort envoyé aux citoyens européens, qui tranche avec le silence du Conseil! », se félicite Françoise Castex. « Les données personnelles des Européens ne sont pas à vendre! »

« Après le scandale de la NSA et alors que nous négocions un accord de libre-échange avec un État qui espionne nos concitoyens, il était fondamental de redéfinir les règles du jeu« , souligne l’eurodéputée Nouvelle Donne.

Les deux textes visent à renforcer la protection des données des citoyens européens et à restaurer la confiance des consommateurs dans les entreprises sur internet. « Nous souhaitions un encadrement plus strict des données pseudonymes, mais ce résultat est dans l’ensemble un bon résultat qui était encore impensable il y a quelques mois”, note Françoise Castex. « Le consentement explicite, l’encadrement des transferts de données vers un État tiers ou la possibilité de déréférencement sont des avancées réelles pour la protection de la vie privée des citoyens européens. »

Avant de conclure: “L’affaire PRISM, et les plaintes de plus en plus nombreuses des consommateurs montrent que la question de la protection des données personnelles est devenue une priorité pour nos concitoyens. Le Conseil ferait une grave erreur en écartant ce sujet à trois mois des élections européennes ».

Pour la Quadrature du Net, des failles majeures subsistent dans le règlement du Parlement européen sur la protection des données. Le Parlement européen vient d’adopter en première lecture le rapport [1] de Jan Philipp Albrecht concernant le règlement général sur la protection des données. Les eurodéputés sont finalement parvenus à résister aux pressions des lobbys [2] et ont rejeté la plupart de leurs propositions préjudiciables [3]. Bien que d’importants progrès ait été réalisés aujourd’hui, les dangereuses notions d’« intérêt légitime » et de « données pseudonymisées » ont été conservées, et pourraient empêcher le texte définitif de protéger les citoyens de manière effective. ***

Le 21 octobre 2013, la commission « libertés civiles » (LIBE) a adopté son rapport relatif au règlement général sur la protection des données, avant de donner mandat à son rapporteur, Jan Philipp Albrecht (Verts/ALE – Allemagne), pour négocier à huis clos un accord avec la Commission européenne et le Conseil des Ministres (trilogue). Ces négociations n’ayant pas débouché sur un consensus, le Parlement européen a finalement adopté un texte identique à celui de LIBE.

Malgré une campagne de lobbying sans précédent menée à Bruxelles par les secteurs de la banque, des technologies et des gouvernements étrangers, la mobilisation de la société civile est parvenue à convaincre les députés de préserver la plupart des progrès introduits par la Commission européenne en 2012 : le consentement explicite [4], des sanctions effectives (pouvant à présent atteindre 5% du chiffre d’affaires mondial d’une entreprise), un champ d’application territorial large et clairement défini, ainsi que des droits plus forts et équilibrés pour les citoyens.

Malheureusement, les députés ne sont pas parvenus à corriger la faille la plus dangereuse laissée dans la proposition initiale par la Commission en 2012 : la définition bien trop large de la notion d’« intérêt légitime ». En tant que tel, l’« intérêt légitime » de quiconque peut être utilisé comme fondement légal permettant d’outrepasser le consentement d’un individu afin de traiter les données le concernant. En outre, le rapport introduit le concept insidieux de données « pseudonymisées », si cher aux lobbys des technologies.

La publication de la position du Conseil sur le règlement est prévue pour les 5 et 6 juin prochains.

« Le vote d’aujourd’hui ferme le premier chapitre d’un long processus qui déterminera si les citoyens européens regagneront le contrôle de leur vie privée. Bien que la société civile se soit fermement opposée aux lobbys des banques, des géants de l’Internet et de certains gouvernements, les eurodéputés ne sont pas parvenus à corriger les failles majeures du texte. Les citoyens doivent exiger de leur gouvernement qu’il corrige ces failles, préserve les avancées, et n’introduise pas de nouvelles exceptions dans le texte. Ce règlement devant être finalisé par le prochain Parlement, les citoyens doivent attirer l’attention des candidats à l’élection européenne sur ces questions. », déclare Miriam Artino, analyste politique à La Quadrature du Net.

* Références *
1. http://www.europarl.europa.eu/sides/getDoc.do?pubRef=-//EP//TEXT+REPORT+A7-2013-0402+0+DOC+XML+V0//FR
2. https://www.laquadrature.net/wiki/Lobbies_on_dataprotection
3. https://www.laquadrature.net/fr/des-failles-majeures-dans-le-reglement-relatif-a-la-vie-privee-le-parlement-doit-defendre-les-citoye
4. https://www.laquadrature.net/fr/privacy-alert-1-le-consentement-explicite

Le Parti Pirate dénonce la surveillance généralisée

Le Parti Pirate s’inquiète fortement de l’adoption mardi 10 décembre par le Sénat de la loi de programmation militaire et en particulier des articles 13 et suivants, relatifs à la surveillance. Il appelle à manifester samedi 21 décembre à 15h place de la République à Paris pour dénoncer les dérives des démocraties et honorer les lanceurs d’alertes et tous celles et ceux qui résistent.

La loi de programmation militaire contient en effet pour nous Pirates une atteinte grave aux libertés individuelles en France, qui n’est pas sans rappeler les mesures « d’exceptions » votées aux États-Unis qui durent depuis plus de douze ans. Elle élargit sensiblement les pouvoirs des services de renseignement en omettant sciemment toute garantie démocratique et juridique.

En effet, les administrations pourront désormais surveiller n’importe qui sans autre prétexte qu’une vague suspicion de délit, se permettant ainsi d’écouter les conversations, de surveiller les déplacements et de manière générale, d’épier et d’enregistrer sans limite nos moindres mots, faits et gestes sans même la consultation d’un magistrat. Délibérément flou, ce texte permet au gouvernement de placer tout citoyen dans un état de surveillance permanent.

Cette loi s’inscrit dans la continuité des lois LOPPSI, grâce auxquelles l’État a pu mettre en place en France, de vastes réseaux de vidéosurveillance dont de récentes affaires nous ont largement démontré l’inutilité en matière de sécurité du public. Ainsi, sacrifiant les libertés individuelles sur l’autel de la paranoïa sécuritaire, le gouvernement français suspecte les citoyens qu’il a le devoir de protéger. Cette loi en rend caduque une autre qui, pourtant, a été si fondamentale qu’elle est longtemps aller « sans dire » : Article 9 du code civil : « Chacun a droit au respect de sa vie privée. »

« Pour qu’on ne puisse abuser du pouvoir, il faut que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir. […] Tout serait perdu, si le même homme, ou le même corps des principaux, ou des nobles, ou du peuple, exerçaient ces trois pouvoirs : celui de faire des lois, celui d’exécuter les résolutions publiques, et celui de juger les crimes ou les différends des particuliers. » Montesquieu, L’Esprit des Lois.

Même son de cloche pour la Quadrature du net. Une grave atteinte aux libertés et aux droits fondamentaux entérinée au Parlement. Malgré l’importante mobilisation citoyenne et les nombreuses critiques [1] exprimées à son encontre, le Sénat vient d’adopter le projet de loi [2] relatif à la programmation militaire et ses dangereuses dispositions sans aucune modification. Cette adoption conforme par les sénateurs met un terme au travail parlementaire sur ce texte : seul le Conseil constitutionnel peut à présent empêcher l’application de ces dispositions attentatoires aux libertés fondamentales des citoyens. La Quadrature du Net appelle solennellement les parlementaires à déposer une saisine du Conseil constitutionnel pour que ce dernier se prononce sur la conformité de cette loi à la Constitution. ***

En adoptant le projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2014 à 2019 sans aucune modification, les sénateurs viennent de mettre un terme aux travaux législatifs du Parlement sur ce dossier. Malgré les nombreux avertissements exprimés tant par les organisations citoyennes [3] que par des autorités publiques [4], le texte adopté aujourd’hui permet :
– la capture en temps réel d’informations et de documents (qui « peuvent être recueillis sur sollicitation du réseau et transmis en temps réel par les opérateurs aux agents mentionnés ») auprès aussi bien des hébergeurs que des fournisseurs de service.
– de requérir ou capturer des « informations ou documents traités ou conservés par leurs réseaux ou services », et non plus seulement des données de connexion.
– l’élargissement de la liste des administrations qui peuvent requérir ces interceptions ou captures, par exemple au ministère de l’économie et du budget.
– l’élargissement des finalités de ces mesures à la sauvegarde du « potentiel scientifique et économique de la France » et à la prévention « de la criminalité ou de la délinquance organisées ».

À ce stade de la procédure, seul le Conseil constitutionnel peut encore empêcher l’application de ces mesures ouvrant la porte à une surveillance généralisée des informations et communications sur Internet. Celui-ci ne pourra examiner la constitutionnalité du texte adopté cet après-midi qu’avec une saisine de 60 parlementaires, du Premier Ministre, ou du Président de la République. La Quadrature du Net appelle solennellement les élus des deux chambres du Parlement à entendre l’appel des citoyens, et à déposer au plus vite une demande de contrôle de constitutionnalité.

« Dans le contexte des révélations d’Edward Snowden sur l’espionnage massif et généralisé des citoyens, il est choquant de voir le Parlement adopter un texte qui entérine l’état d’exception et permet de violer la vie privée des citoyens. Les élus doivent entendre l’appel de la société civile et saisir le Conseil constitutionnel avant l’application de ces mesures attentatoires aux libertés fondamentales » déclare Philippe Aigrain, cofondateur de La Quadrature du Net.

* Références *
1. https://www.laquadrature.net/fr/pcinpact-surveillance-du-net-deluge-de-contestations-contre-le-patriot-act-francais
2. http://www.assemblee-nationale.fr/14/ta/ta0251.asp
3. Par exemple par l’AFDEL, la Fédération internationale des droits de l’Homme, ou La Quadrature du Net.
4. Notamment par le Conseil National du Numérique et la CNIL.

Privacy Alert

Depuis plus d’un an, le Parlement européen étudie la proposition de règlement [1] de la Commission européenne qui vise à réformer la législation encadrant la protection des données personnelles au niveau européen. Jusqu’à présent, les différentes commissions parlementaires ayant travaillé sur ce projet se sont exprimées pour l’assouplissement des règles protégeant notre vie privée. Alors qu’un vote crucial approche [2] au sein de la commission « libertés civiles » (LIBE), La Quadrature du Net commence la publication d’une série d’analyses [3] abordant les points clefs, enjeux, progrès et dangers de cette réforme. ***

Face au développement de pratiques dangereuses pour notre vie privée de la part d’entreprises peu scrupuleuses, et afin d’encadrer la collecte, le traitement, et la vente des données personnelles des citoyens européens, la Commission européenne a présenté en janvier 2012 une proposition de règlement [1] destinée à réformer la législation en vigueur, datant de 1995. Ce règlement, qui devrait entrer en vigueur en 2015, sera directement applicable dans l’ensemble des États membres de l’Union européenne et se substituera immédiatement à toutes les lois nationales existantes en la matière [4]. Tel que proposé par Viviane Reding, commissaire à la Justice, aux Droits fondamentaux et à la Citoyenneté, il pourrait constituer une réelle avancée pour la protection de notre vie privée.

Adopté en l’état, le règlement permettrait de :

   – renforcer considérablement les droits des citoyens, les obligations des entreprises et les pouvoirs conférés aux autorités de contrôle, à l’instar de la CNIL [5] en France ;    – définir plus largement la portée de ce cadre légal afin de couvrir les activités de toute entreprise – quelque soit sa situation géographique – analysant les comportements des citoyens européens ou leur proposant des biens ou des services.

Une campagne de lobbying sans précédent

En réponse à la proposition de la Commission, de puissantes entreprises, principalement américaines (banques, assurances et services Internet), ont mené une campagne de lobbying sans précédent [6] afin de faire exclure de la version finale du règlement les propositions destinées à protéger les données personnelles des citoyens. Comme l’a clairement démontré le site Internet LobbyPlag [7], certains députés européens clés ont ainsi recopié mot pour mot les demandes des lobbies dans leurs propositions d’amendements.

Quatre commissions [8] du Parlement européen ont déjà exprimé leur avis sur les modifications à apporter à la proposition de la Commission. Directement influencées par les lobbies, elles se sont chaque fois exprimées en faveur de l’affaiblissement du cadre législatif protégeant la vie privée des citoyens européens et de la réduction des responsabilités incombant aux entreprises.

Ces avis n’ont cependant qu’une valeur consultative, et la situation peut encore être renversée : la liste des amendements que le Parlement européen dans son ensemble pourra adopter lors de la première lecture du texte, prévue pour la fin de l’année 2013, doit être adoptée par la commission « libertés civiles » (LIBE) lors d’un vote devant avoir lieu avant la fin du mois de juin.

Agissons !

Avant ce vote, nous devons nous assurer que ces députés ne céderont pas aux pressions des lobbies, comme ont pu le faire ceux des commissions ayant déjà exprimé leur avis, mais qu’ils garantiront une mise en œuvre efficace des avancées proposées par la Commission. Dès à présent et jusqu’au moment du vote, les citoyens doivent contacter [9] leurs députés européens et réclamer une réelle protection de leur droit fondamental à la vie privée. Comme l’a démontré le rejet d’ACTA [10] l’été dernier, les appels des citoyens à protéger l’intérêt général plutôt que les intérêts privés de quelques uns peuvent être entendus par les élus, à condition que cette mobilisation citoyenne soit suffisamment importante, soutenue et relayée.

Pour permettre à tous de s’approprier les enjeux et points clés de ce débat, La Quadrature du Net démarre la publication d’une série d’analyses présentant les principaux aspects du projet de règlement. Chacune abordera les avancées que pourraient constituer les propositions de la Commission, les raisons pour lesquelles les lobbies de l’industrie s’y opposent et les positions exprimées par les députés européens jusqu’à présent.

Privacy Alert : #1

Le consentement explicite La première analyse (à venir) de cette série abordera la question du « consentement explicite » et son rôle central dans le contrôle de nos données personnelles.

Références

1. http://ec.europa.eu/justice/data-protection/document/review2012/com_2012_11_fr.pdf

2. Le vote de la commission LIBE était initialement prévu pour les 29-30 mai, mais devrait finalement avoir lieu au mois de juin.

3. https://www.laquadrature.net/fr/privacy-alert-0-introduction#sommaire

4. La Commission européenne est l’institution disposant de l’initiative législative au niveau européen. Le Parlement européen et le Conseil de l’Union européenne (formé de ministres des différents États membres) peuvent amender les textes législatifs proposés par la Commission jusqu’à arriver à un accord sur le texte à adopter, qui entrera alors en vigueur, ou à le rejeter.

Au terme de ce processus, deux types d’actes législatifs peuvent être adoptés : une directive, qui pose des objectifs et des principes que chaque État membre devra intégrer dans son droit national, quitte à adopter une loi nouvelle ; ou un règlement, qui s’appliquera directement à l’ensemble des États membres.

Le choix du règlement semble particulièrement adapté pour contrôler la circulation des données personnelles sur Internet, qui est par essence transfrontalière. L’actuelle réglementation européenne en la matière – la directive de 1995 – pâti, entre autres, d’une transposition et d’une interprétation hétérogènes au sein des différents pays membres de l’Union européenne, dont certaines entreprises peu respectueuses de la vie privée profitent.

5. La Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) est une autorité administrative indépendante française. La CNIL est chargée de veiller à ce que l’informatique soit au service du citoyen et qu’elle ne porte atteinte ni à l’identité humaine, ni à la vie privée, ni aux libertés individuelles ou publiques, ni à aucun autre droit de l’Homme.

6. Voir la page du wiki de La Quadrature [en] recensant un grand nombre des documents envoyés aux députés européens par des entreprises privées : https://www.laquadrature.net/wiki/Lobbies_on_dataprotection

7. http://lobbyplag.eu/

8. Avant de voter en formation plénière, les députés du Parlement européen travaillent au sein de commissions parlementaires, chacune chargée de thèmes différents (libertés civiles, emploi, agriculture, etc) et composées de quelques dizaines de membres. Ces commissions parlementaires étudient les propositions législatives faites par la Commission européenne et proposent les amendements que l’ensemble du Parlement européen votera lors des sessions plénières.

Les commissions « consommateurs » (IMCO), « emploi » (EMPL), « industrie » (ITRE) et « affaires juridiques » (JURI) ont chacune proposé des amendements à la commission « libertés civiles » (LIBE), chargée de rédiger le rapport destiné à l’ensemble du Parlement.

Voir le wiki de La Quadrature pour une analyse détaillée des amendements les plus dangereux proposés par chaque commission : pour IMCO [en] https://www.laquadrature.net/wiki/Data_protection:_IMCO pour ITRE [en] https://www.laquadrature.net/wiki/Data_protection:_ITRE pour JURI [en] https://www.laquadrature.net/wiki/Data_protection:_JURI

9. https://www.laquadrature.net/wiki/Comment_contacter_un_d%C3%A9put%C3%A9_europ%C3%A9en

10. https://www.laquadrature.net/fr/acta-victoire-totale-pour-les-citoyens-et-la-democratie